Seul dans ma cellule ou en compagnie des autres étudiants, je luttais avec âpreté contre le "mâle". J'appris peu à peu à éviter les pièges de la tentation, bien que je n'ignorasse point la brièveté des trêves consenties par les sens. Je ne me contentais pas de m'éloigner certains jours de la cause de mes émois impurs, je me donnais également la discipline afin, espérais-je, de tuer le désir. Hélas ! la chair mortifiée se rebellait assez vite et je me retrouvais bientôt face à mes démons qui me défiaient de plus belle, la corne acérée, l'oeil plus lascif encore... Le mal ne faisait qu'empirer, aussi dus-je changer de méthode.
La volonté seule ne suffisant plus à borner mes excès, j'optai pour la solution la moins modeste. A l'étude approfondie des livres anciens de théologie censés me distraire de mes fantaisies honteuses, j'ajoutai la chimie lourde. Latin et sel de bromure devaient me délivrer, pensais-je, des tourments grandissants de ma chair incapable de se soumettre à la loi divine. Peine perdue !
La nature prenant définitivement le dessus, je décidai d'apaiser l'ogre libidineux qui réclamait son dû : je pris un amant. Dans la foulée je m'improvisai porte-parole de mes frères d'infortune, partagés entre le désir de servir le Ciel et l'oppression de leur chair dénaturée, incompatible avec la dignité de leur futur ministère. En interrogeant les élèves et mes supérieurs je découvris que le séminaire était un repaire d'homosexuels à divers degrés refoulés mais parfaitement conscients de leur état...
Je terminai mes études dans la plénitude spirituelle et fus ordonné prêtre dans le quartier du Marais.

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