samedi 1 mai 2010

872 - La vendeuse de muguet

Avec sa mine pâle, sa claudication disgracieuse, son air abattu et ses habits tristes, la demi mendiante me héla avec une infinie maladresse tandis que je traversais la rue pour me rendre à la boulangerie.

J'avais oublié que nous étions le 1er mai... Accoutumé à vivre loin de la plèbe et de ses moeurs odieuses, je me sentais parfaitement étranger à son univers imbécile et vulgaire. Et lorsque de temps à autre me parvenaient les clameurs populaires (depuis les banales manifestations syndicales de rues jusqu'aux expressions de joies crapuleuses des bals du 14 juillet), non sans une réelle satisfaction je prenais conscience de la hauteur séparant ma tour d'ivoire de ce monde misérable.

Son mauvais muguet à la main, la pauvresse insistait péniblement, sollicitant en vain ma générosité d'oisif avaricieux.

Avec irritation j'expliquai brièvement à la gueuse qu'en aucun cas je ne comptais dépenser quelques pièces pour un méchant brin de muguet dont je n'avais que faire et que de toute façon j'avais besoin de mes sous pour acheter mes pâtisseries du matin à la boulangerie située juste derrière son stand, enfin que toute sa personne avec ses allures d'indigente m'indisposait au possible.

Pressé d'aller acheter mes gâteaux, je laissai l'importune à ses illusions de piécettes.

En sortant de la boulangerie, les mains chargées de trésors de raffinements au beurre frais et au sucre glacé, je croisai de nouveau la saltimbanque qui, jalouse à la vue de mon gros paquet de pâtisseries, se fit suppliante.

Excédé par les manigances grotesques de cette espèce d'analphabète cherchant à se faire apitoyer, j'arrachai rageusement son muguet des mains pour le lui jeter au visage ! Enfin je n'omis pas de la bénir d'un crachat d'aristocrate bien placé entre les deux yeux, qu'elle avait bruns (une roumaine sans doute), avant de m'éloigner avec morgue jusqu'au sommet de mon domicile inaccessible à la gueusaille.

Qu'il est triste ce monde où les beaux sires de mon espèce, une fois l'an se font agresser dans la rue par de vilaines vendeuses de muguet...

Je rêve d'une société plus juste, fraternelle et sans hypocrisie où les seigneurs seraient mieux respectés des va-nu-pieds. On réclame sans cesse la compassion à l'égard des pauvres mais jamais on ne parle d'honorer les sybarites pour ce qu'ils sont... Eux qui ont l'heur d'avoir les mains lisses et l'esprit éclatant mériteraient donc le mépris de la part des pauvres gens aux mains calleuses ? Et en vertu de quel principe souverain ?

Est-ce donc cela qu'on appelle le sens de la justice ?

Aujourd'hui 1er mai je viens de courageusement défendre les intérêts de l'esprit contre la dictature et la bêtise infâmes, étouffantes et régressives des laborieux.

10 commentaires:

  1. mdr j'aime bien !
    Personellement, je ne vends rien mais j'offre gratuitement une simple image de muguet afin de ne pas déranger la tranquilité et le porte-monnaie des autres ! ;)

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  2. vous semblez venir d'une autre époque ,tant votre propos est ennuyeux ,les paroles vous coulent du nez comme un gamin que l'on a pas mouché;petit enfant gâté des faubourgs élyséens .

    Dormez en paix ,la police veille.

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  3. je vous remercie pour votre copier/coller de votre article sur mon blog. Je ne critiquerai nullement pas vos pensées car je trouve que dans la vie, chacun a le droit de dire ce qu'il ressent à condition de rester correct et courtois face à des opinions différentes. C'est la seule liberté qui nous reste : pensée.
    Quoiqu'il en soit, je trouve cet article des plus intéressant comme je l'ai rajouté à la suite de votre commentaire sur mon blog.
    Amicalement francine
    Merci et qui sait au plaisir de vous relire même si nos points de vue peuvent quelques fois diverger.

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  4. Sire que Votre Majesté me pardonne mon impertinence mais le propos est d'importance et ne saurait être traité rapidement.Le sujet est grave et à notre époque vous n'avez plus la parole.Honte à vous qui prenez vos semblables pour des serfs .Je ne pensais pas qu'à notre époque la Royauté aussi vindicative existait encore. Un inconnu dont le nom possède une particule ROBERT

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  5. Votre coeur est dur comme la pierre, et votre plume chargée de venin.
    Le muguet selon la tradition doit apporter du bonheur pour l'année.
    Un brin de muguet payé d'un crachat, voilà la promesse d'une année à la hauteur de la valeur donnée à ce brin de muguet pour l'avare insultant.

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  6. Anonyme,
    Ou pourrait perdre un bon rapublicain toute son intelligence, pour juger l'auteur d'apres un personnage?
    Je pense pourtant qu'il faudrait chercher autour de l'ecran plat de la television.
    Anna

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  7. Bonjour.
    Moi aussi, j'ai croisé une mendiante qui avait un pauvre bouquet de muguet dans la main, boulevard St-Germain.
    Elle était accroupie, endormie de fatigue. J'ai pris une pièce de deux euros dans mon porte-monnaie, j'ai doucement ouvert sa main, j'ai pris le bouquet en glissant la pièce dans sa sébile, je lui ai fait un sourire quand elle a ouvert les yeux.
    Elle m'a rendu mon sourire : je la connais, je lui donne un pièce chaque fois que je passe à cet endroit, une fois par semaine.
    Je me suis éloignée, en respirant les quelques clochettes qui n'étaient ni en bouton, ni fanées.
    J'ai donné le bouquet à la commerçante où je suis allée faire des achats. Et qui m'a remerciée !!

    D'origine espagnole (limosnica, por Dios!), et 35 ans de salariat avant un Plan social qui vient de me mettre en pré-retraite : suis-je une cruche ?

    Nicole

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  8. Bonjour Nicole,

    Vous assumez vos choix comme j'assume les miens, n'est-ce pas l'essentiel ?

    Je ne porte pas de jugement sur vos actes, j'agis autrement, voilà tout.

    Raphaël Zacharie de IZARRA

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  9. Désolée...!Je dois être devenue complétement folle !
    Je vous vois cracher sur un symbole**, pas sur une pauvresse.

    ** fête de l'acceptation d'un asservissement légalisé et organisé, assorti d'une rémunération basée sur une grille non équitable et récupérée commercialement. (c'est à dire une certaine vision du bonheur selon...selon...celui qui a eu l'idée d'associer cette notion au travail !)

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